Arrêt sur saison

Article mis à jour le 6 Nov 2022

La nature est bien judicieuse, sous nos latitudes, d’orchestrer la plupart des éclosions et naissances au printemps. L’été, qui offre tant de ressources pour tant d’espèces, est un cadeau pour la vie qui émerge

Les fruits se gorgent de soleil, assurant ainsi une attraction forte sur tant de créatures susceptibles de disperser les graines.

Les insectes se ravitaillent de toutes leurs belles manières de spécialistes, les concerts mêlés des amphibiens et des criquets nous captivent au plus profond de la nuit tandis que l’Engoulevent roule son chant. De nombreux jeunes mammifères et oiseaux apprennent à se nourrir par eux-mêmes au contact de leurs parents, avant de s’émanciper sous les températures clémentes. Le froid, la disette, de longues nuits viendront, mais grâce à l’été, ils s’y seront préparés !

C’est aussi le moment pour les adultes reproducteurs de profiter de la saison propice pour faire les meilleurs choix, avec des stratégies très diverses. Rien que chez les oiseaux, il existe quantités de possibilités : le petit Accenteur mouchet, par exemple, a opté pour être l’un des premiers passereaux à se reproduire dans l’année, dès le mois d’avril. Il peut ainsi s’atteler à une deuxième couvée au mois de juin. Les autres espèces, pour la plupart, ne feront une seconde ponte qu’en cas d’échec de la première couvée… Tant que l’on ne dépasse pas le mois de juillet. Si la saison est trop avancée, les jeunes n’auraient jamais l’occasion de faire à leur tour leurs précieuses réserves. Parfois, les jeunes de la première couvée aident les parents à nourrir la seconde nichée, comme c’est le cas chez les Foulques et les Poules d’eau.

Certains oiseaux s’acquittent de la reproduction efficacement malgré leur arrivée tardive en région arctique, comme c’est le cas chez de nombreux limicoles : ces petits échassiers des vasières, qui doivent souvent prendre en compte un long voyage migratoire dans leur saison de reproduction, peuvent entamer dès le mois de juillet le renouvellement de leur plumage, afin de déjà couvrir en août les milliers de kilomètres qui les séparent de l’Afrique.

Il est souvent ignoré que dès la fin de juillet, les premiers grands migrateurs ont entamé leur voyage : les Martinets noirs, qui nous ont fréquentés seulement trois mois, déjà repartent pour bon nombre vers l'Afrique, pour ne probablement jamais plus se poser durant 8 mois, jusqu’à la reproduction suivante ! Les oiseaux planeurs, tels que les cigognes, ont besoin des courants ascendants pour migrer. Seul un beau soleil chauffant le sol pourra les générer, il n’est nulle question d’attendre l’automne.

Pour ce qui est des limicoles, on ne compte pas sur le vent pour faire planer ses grandes ailes, mais sur une modification du régime alimentaire afin de préparer des réserves de graisse importantes - jusqu’à plus d’un tiers en plus de la masse initiale – pour faire battre avec endurance et rapidité des ailes effilées.

Ce sont les jeunes oiseaux volants et les adultes ayant connu un échec de reproduction qui entament en premier leur vol vers le Sud, suivis de près par leurs congénères, ce qui occasionne de grands stationnements d’oiseaux en provenance de Russie et de Scandinavie sur nos marais et lagunes saumâtres au mois d’août. Pendant ce temps, ô surprise ! d'autres oiseaux partent vers le Nord : ce sont les Tadornes de Belon, qui vont se rassembler pour faire leur mue au large des côtes allemandes ; chez ces oiseaux, la mue est audacieuse puisqu’ils perdent beaucoup de plumes d’un coup au point de ne plus pouvoir voler pendant plusieurs semaines, le choix du site est donc crucial et ces rassemblements sur la mer des Wadden existaient déjà bien avant nous…

Beaucoup de passereaux entament à leur tour leur migration, suivis judicieusement par les rapaces qui pourront s’y servir au gré de leur propre voyage. En septembre, le flux continue avec d’autres espèces, dont les hirondelles, puis vient le temps des voyages des migrateurs sur de courtes distances, comme le Tarier pâtre, le Pouillot véloce…

Pendant ce temps, les hormones du beau Cerf élaphe commencent à se réveiller, sa ramure est magnifique, ses larmiers sont de plus en plus prononcés, ce qui lui confère une sorte de maquillage aux yeux tout bonnement magnifique. En cette période, il devient de moins en moins craintif, si fier, il n’a jamais semblé aussi grand de toute l’année.

Mais comment toutes ces espèces suivent de si près le calendrier de Dame Nature, en dépit des surprenantes fluctuations de la météo ? Plus que le froid ou la nourriture, c’est la réduction des jours à partir de la fin juin qui rappelle à chacun ce qui lui reste à faire d’ici la morte saison, agissant sur les hormones déclenchant la mue, le besoin de migrer, la pousse de la bourre (poils courts, doux et chauds) dans le pelage des mammifères…

Nous autres humains sédentaires sentons encore dans notre rythme biologique le jeu des saisons qui bat en nous. Quelque part, nous pouvons être fiers de notre espèce, qui a su se préparer le plus grand confort pour affronter l’hiver, manger avec la même abondance, avoir de la chaleur dans son foyer, travailler tout autant, à la lumière artificielle. Pourtant, pour certains d’entre nous, quelque chose nous appelle lors de la réduction des jours à un arrêt de toute cette effervescence, une contemplation de la nature, une envie de recul, de simplicité.

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